Bâtiment Walid Daqqah: Quand le vieux monde se radicalise, le nouveau monde occupe et résiste

Beaucoup d’encre a coulé. Mais le traitement médiatique de l’occupation d’un bâtiment de l’ULB dans le cadre du mouvement Escalate For Palestine n’est-il pas symptomatique d’une narration constamment en faveur de l’ordre établi ? Envers et contre tout… « Occuper l’espace public, c’est aussi rappeler, que l’illégal peut être légitime, que le légal n’est pas toujours juste, et que le vernis du Vieux Monde doit craquer. »

Aux États-Unis, les étudiant.e.s mobilisé.e.s en soutien à la Palestine, dans le mouvement d'occupation de leur campus, ont subi répression policière, arrestation et

exclusion de leur université.

En France, face au mouvement d'occupation de Sciences Po Paris pour protester contre le génocide, la présidente de la région Île-de-France a décidé de suspendre le versement d'un million d'euros de subsides qui devaient revenir à l'école.

La Belgique faisait figure, en comparaison avec la France et les U.S.A, d'élève un peu moins médiocre : Manifestations non réprimées, déclarations politiques prometteuses ...

Mais face à la poursuite du génocide, les lâchetés, les mots creux, la complicité et la collaboration persistantes ont conduit à une urgence :

il faut désormais prendre la rue sans en demander la permission.

Le mouvement Escalate For Palestine a conduit les civil·e·s à manifester devant l'ambassade d'Israël et à prolonger la mobilisation dans les rues de Bruxelles, malgré la répression et la violence policière.

Finis les sentiers balisés par la police, finies les autorisations :

face à l'urgence de l'extermination d'autres peuples, la rue doit revenir aux humain.e.s, spontanément et quand la nécessité le dicte.

À Bruxelles, Escalate For Palestine a trouvé ses racines dans les occupations étudiantes de la VUB et de l'ULB,avec le bâtiment Walid Daqqah comme point de départ au mouvement.

Le 7 mai 2024, des étudiant.e.s avaient décidé de s'emparer du bâtiment "B" pour en faire un lieu de résistance auto-géré et un levier de négociations avecles autorités académiques de l'ULB.

Depuis le début du génocide à Gaza, les autorités de l'ULB, à l'instar de nos responsables politiques, se sont fendues de promesses sans effets. La fin des accords avec les universités israëliennes se faisait attendre. Il fallait incarner la résistance et secouer : l'occupation a commencé.

Le 27 mai 2024, coup de théâtre : l'ULB suspend ses accords avec les universités israëliennes...Et palestiniennes ! Ce faisant, par cette décision "unique au monde",

l'ULB décide, rappelons-le : de punir la victime du génocide en cours à Gaza,et du nettoyage ethnique en Cisjordanie, dans le contexte du colonialisme, de l'apartheid et de l'occupation qui durent maintenant depuis 76 ans.

Par cette décision inique, l'ULB reprend en outre les termes de la rhétorique génocidaire d'Israël puisqu'elle a décidé de mettre à égalité victime et bourreau et de faire porter aux universités palestiniennes le poids de décisions qui ne sont pas les siennes pour trouver prétexte à les attaquer. "Si ce n'est toi, c'est donc ton frère" : parce que palestiniennes, ces universités doivent montrer patte blanche pour ne pas être "boycottées" par l'ULB, alors même qu'il s'agit d'universités qui se font constamment aggresser par Israël en Cisjordanie, ou carrément bombarder dans le cadre du génocide à Gaza.

Martelons-le encore.

Les universités palestiniennes sont victimes de l'effort de guerre soutenu par les universités israëliennes. Les universités palestiniennes ne sont complices d'aucun crime de guerre, d'aucune politique d'apartheid, d'aucun génocide, contrairement aux universités israeliennes.

Mais l'ULB a décidé de les mettre dans le même sac. Et un mois plus tard, l'ULB autorisera la police à expulser violemment les étudiant.e.s résistant.e.s de l'université populaire étudiante.

Face à cette radicalité coloniale, que valent les conférences autorisées du bout des lèvres ? Les pétitions étudiantes ? Les rassemblement polis ? Les étudiant.e.s l'ont démontré : occuper l'espace public , c'est aussi rappeler, que l'illégal peut être légitime, que le légal n'est pas toujours juste, et que le vernis du Vieux Monde doit craquer.

Ines Talaouanou
19/7/2024

A lire également

Culture
Justice
Militance
Société

Bruxelles, terrain d’(en)jeu (dé)colonial

Le 20 juin dernier marquait les 64 ans de l’indépendance du Congo. Un pays dont une partie de l’histoire est tristement liée à la Belgique. Des décennies de colonisation, des millions de mort·e·s et d’innombrables exactions. Aujourd’hui, il n’y a toujours pas de consensus politique sur la position que la Belgique doit adopter au regard de son passé colonial. Pire, l’espace public regorge de symboles coloniaux vecteurs d’un récit partial. Une réflexion sur l’espace public ne peut omettre la question des vestiges du passé colonial belge. Retour sur les balises historiques, l’état des lieux, BLM, les initiatives militantes et associatives et le rapport du groupe de travail bruxellois « Vers la décolonisation de l’espace public en Région de Bruxelles-Capitale. »
Ilyas Boukria
4/8/2024
Environnement
Politique
Sport

JO 2024: L’espace public mis en jeu

Ça y est, les Jeux olympiques 2024 sont officiellement lancés. Vendredi soir, le monde entier avait les yeux rivés sur Paris où la cérémonie d’ouverture de cet événement titanesque en a mis plein les yeux à plus d’un·e. Derrière les costumes, les danses et les paillettes se cachent pourtant des mesures bien moins réjouissantes. Depuis sa candidature en 2015, la France a pris une série d’initiatives pour s’assurer d’être vue sous son meilleur jour le long de la compétition, quitte à ce que ce soit au détriment de ses propres citoyen·ne·s et de leur espace public. Réquisition de logement étudiants, réservation de bandes de circulation, augmentation des prix des transports, barrières, QR code, vidéosurveillance algorithmique, nettoyage social et chute de l’horeca. Découvre le revers de la médaille de ces Jeux olympiques 2024.
Ilyas Boukria
29/7/2024
Éducation
Justice
Militance

Artefact 2: " L’occupation estudiantine, une micro-société ? "

Une société dans une société. Au sein du bâtiment renommé Walid Daqqa en hommage au résistant palestinien, rien n'est laissé au hasard. Organisation, démocratie et participation sont les maîtres-mots. ⚠️
Laurianne Systermans
21/7/2024